la famille Dellepiane

J’ai découvert cette famille qui a habité notre quartier pendant plus d’un siècle, grâce à Louis et Marcelle (rencontrés en 1989). Ils étaient les neveu et nièce du plus célèbre d’entre eux, David, lithographe et peintre, qui a donné son nom au Vallon Jourdan. Leurs souvenirs d’enfance m’ont été précieux pour établir l’histoire du quartier « d’avant ».

Les souvenirs de Louis Dellepiane :

Ce vieux monsieur (94 ans), est charmant. Son père était sculpteur, lui-même était peintre… sa maison est remplie de souvenirs artistiques : tableaux, affiches, sculptures, esquisses, céramiques etc Rien que pour la visite de ce petit musée, la rencontre valait la peine d’être vécue. Louis Dellepiane a vécu durant son enfance rue de l’Étoile (rue Perlet), et pendant plusieurs heures, il évoque ses souvenirs de ce quartier. Il allait avec sa famille au Familial Cinéma (à emplacement de l’actuel 133 rue d’Endoume); il y avait 2 classes: l’une offrait des bancs sur le devant de la salle, l’autre, des chaises à l’arrière. On appelait alors le haut de la rue d’Endoume (vers le 165) « la montagne ». A la place de la teinturerie au N° 129 se tenaient deux sapeur-pompiers : l’un était cordonnier, l’autre tailleur. Quatre hommes s’occupaient de la pompe à bras; la manche était enroulée sur une roue de vélo, mais le pompier ne savait pas monter à vélo, alors il poussait l’engin…. bd Marius Thomas se tenait un marchand de grains et fourrages, et aussi une laiterie. Avant la création du théâtre Silvain il y avait un jeu de boules et un café. Au fond de l’actuelle rue René Seyssaud il y avait la Gendarmerie nationale. A st Victor, on changeait de wattman et de receveur : c’était la « relève ». Une société musicale, « les épongeurs« , avait son siège au bar de la Station; son drapeau comportait deux éponges. Au bar de la Renaissance se retrouvaient tous les voyous du quartier. Au bas du Bd Marius Thomas, les enfants lançaient des cerfs-volants et en haut du boulevard d’autres enfants récupéraient ceux qui y atterrissaient. A la rue d’Endoume il y avait une fabrique de couronnes (mortuaires) en perles (aujourd’hui Studio D’Urso). Habitaient là aussi, Mr et Mme Faust, artistes peintres. Mr Perlet (qui a donné son nom à la rue) était Conseiller Municipal et Me Taddei travaillait à la Préfecture. Le parti Socialiste était appelé « le parti du service rendu.

Sa famille : Victor, le père, était un réfugié politique (garibaldien). Il était sculpteur sur bois (spécialiste des proues de navire). Incroyant, il fut tout de même convoqué un jour par l’évêque de Marseille pour refaire la statue de la Vierge Noire (abbaye de St Victor). Près de la Mairie se trouvait un bar où les garibaldiens se rencontraient (cf le tableau peint par David -Musée du Vieux-Marseille). Louis avec son frère ainé, Charles, allait acheter le vin pour la famille à la Tourette. Le père leur donnait 2 sous pour emprunter le pont transbordeur. Mais à l’aller, les 2 garçons faisaient le tour du Vieux-Port à pied, et économisaient ainsi 1 sou. La fratrie : Jean Baptiste, l’ainé, a eu 3 garçons et une fille, Charles né en 1895, Louis en 1897, Thomas en 1899, ainsi que Marcelle. La famille habitait rue d’ l’Étoile, du côté droit, juste après la villa l’Alessandra (propriétaire Mr Serbo qui avait acheté la terrain en face pour qu’on ne lui prenne pas la vue sur le Vieux-Port); la maison des Dellepiane se composait d’un étage sur rez-de-chaussée, derrière se trouvait une terrasse et un jardin qui allait jusqu’à l’impasse de la Gavelière. David y a habité tout d’abord avant de s’installer à la Corderie. A Bompard, il y avait 2 cordonniers sourds-muets; ils avaient relié un pantin à la porte de la boutique qui s’agitait et les prévenait dès que celle-ci s’ouvrait. Dans le Vieux Chemin d’Endoume, un tourneur sur bois eut beaucoup de clients (les enfants) lorsqu’il se mit à la mode et fabriqua des diabolos. Ripoli, rue d’Endoume, était le coiffeur de Italiens; il jouait de la mandoline. Le club de Mandoline avait son siège au bar angle.Bompard-rue Ste Eugénie (Michel Gachet). A la rue du Fort (rue Joel Recher) se trouvait une fabrique de clous artisanale, à gauche en descendant, entre la rue St Lambert et la rue Clotilde. Le ferrailleur, rue St Lambert, achetait tout : 2 sous et un sou à faire vrier (c.à.d. à pile ou face). L’église d’Endoume fut érigée en 1842 par Mgr Mazenod au milieu des cabanons et des guinguettes. En 1860 se construisirent beaucoup de bastides.

Les souvenirs de Marcelle Dellepiane-Peri

Elle a toujours habité le quartier; elle est née rue d’Endoume, à côté du brocanteur Sauzé (commerce sis au N°91, disparu); de 1901 à 1948, elle habitait avec sa famille rue de l’Étoile (rue Perlet). Elle a fréquenté l’école Marius Thomas, et pendant la guerre de 14-18 celle du Roucas-Blanc (l’école Marius Thomas servant d’hôpital militaire). Elle se souvient du nom de toutes les enseignantes : Mme Flachat, directrice, Mme Leonfu, Mme Turca (grand mère d’Yves Dollo), Mme Commeau, Mme Demarchi; la concierge de l’école maternelle s’appelait Mme Maurel. Un lavoir se trouvait rue Ste Eugénie, à l’emplacement du 9 rue Michel Gachet); le linge séchait sur la colline jusqu’au bd Marius Thomas.

Le recensement de 1906, accessible via les Archives départementales des B-du-R) permet de retrouver la famille Dellepiane au N° 17A avec Louis et Marcelle) :

Afin de mieux connaitre la famille Dellepiane, j’ai établi sa généalogie : https://gw.geneanet.org/labuttebompard_w?lang=fr&m=S&n=dellepiane&p=

Les Dellepiane sont restés fidèles à Endoume c’est pourquoi on a donné le nom du plus célèbre d’entre eux, David, à la rue vallon Jourdan, alors qu’il avait vécu jeune à la rue de l’Étoile, puis avait vécu adulte à la rue Delille !

Les Dellepiane à Endoume (DOCS : recensements Marseille et Indicateur marseillais).